BOUCLET Jean (1924-1944)  Leclerc/2eDB        Cadet de la France Libre                                    501e Régiment de Chars de Combat            Mort pour la France

Jean BOUCLET  (crédit photo ASCFL)

Mis à jour le 18 décembre 2021 par Isabelle Duhamel

Nos remerciements à Mme Pillet, Proviseur du Lycée François 1er, Monsieur Hugues Lavoix (Association Souvenir des Cadets de la France Libre) et Laurent Laloup, (extraits cités, via le livre d'Or des Français Libres.)

Jean Robert Armand Lucien BOUCLET est né à Pontivy le 24 septembre 1924, de Lucien Édouard et de Agnès Suzanne Maria Joséphine Prévoteau.

 

fut scolarisé au Lycée de Garçons (François 1er) jusqu'en classe de Seconde, de 1933 à 1938-39. Son père, (ancien élève Polytechnique et ENS),  était secrétaire général de la Société des extraits tinctoriaux. Son frère Louis, de quatre ans son aîné, Enseigne de vaisseau de 1ère classe sera tué le 8 novembre 1942 au large d'Oran, sur l'aviso "la Surprise" de la Marine vichyste, lors du bombardement anglais de Mers-el-Kébir.

 

Dans son ouvrage "Du Cotentin à Colmar avec les chars de Leclerc", Maurice BOVERAT, ancien de la 2e DB, indique que Jean s'était engagé en 1940 à 16 ans, sans que  cette information ait pu être vérifiée et que nous en connaissions les circonstances.

Cependant, nous retrouvons en 1941 Jean BOUCLET, élève de la 1ère Promotion, "Libération", à l'Ecole des Cadets de la France Libre en Angleterre (l'équivalent de l'Ecole de Saint-Cyr.) 

 

Le 13 septembre 1941, le général de Gaulle rendit visite aux Cadets de la Promotion Libération au cours de laquelle il leur remit leur fanion.

" Le Général arrive en voiture en compagnie du lieutenant Geoffroy de Courcelles, son aide de camp, et d'un capitaine de son entourage qui ne cessera de prendre des notes pendant toute la visite. Sir Percy Everett les accompagne. Notre visiteur prend la peine de visiter toutes les tentes, une à une, baissant sa haute stature pour franchir l'échancrure des doubles-toits. Il interroge beaucoup d'entre nous, J. BOUCLET et J. Jeanne en particulier. Visiblement, en bon chef, il prend le pouls de sa jeune troupe et se forge une première opinion à notre sujet." raconte André CASALIS, dans son livre "Cadets de la France Libre".

 

Jean BOUCLET ne fut pas promu à l'issue de ces cours, mais, nanti d'une solide formation, le jeune sergent fut ensuite affecté au prestigieux 501e Régiment de Chars de Combat de la 2e DB.

 

Voici une évocation par Jacques BRANET dans son livre "L'Escadron, carnets d'un cavalier" :

" Le corps des sous-officiers a été presque entiè­rement formé par nous. Il compte notamment le vieil adjudant-chef Carpy, venu avec nous de Russie, l'adju­dant Le Coent, type de 45 ans, du Canada, qui ne rêve que plaies et bosses, le chef Huot, grand blessé de Dunkerque, le chef Boulanger, des chasseurs de Nor­vège, etc. Cuissot et Aumont viennent de Russie aussi, avec Buisson.

Quant aux petits jeunes, anciens élèves de Meyer, les BOUCLET, La Fouchardière, Picart, etc., ils sont pleins de flamme.

Ne pas oublier le médecin auxiliaire Le Gall, un petit Breton condamné à mort par Vichy."

 

En avril 1944, au terme d’une traversée de 21 jours sur un navire transport de troupes, la 2e DB fut transportée d’Oran en Grande- Bretagne, près de Hull, où elle  suivit un entraînement intensif dans la perspective de son Débarquement en France.

Quatre mois plus tard, elle débarque le 1er août 1944 à Saint-Martin-de Varreville dans la Manche, pour s'engager immédiatement dans la Campagne de Normandie, qui va rapidement se déployer dans l'Orne.

 

Le sergent Jean BOUCLET, alors Chef de char de l'Ourcq  a pour équipage le Tireur Georges Douillon, le Pilote Lafont, l'Aide-pilote Vercher et le Radio-chargeur Philippe Cadiot.

 

Une dizaine de jours plus tard, en forêt d'Ecouves, le 13 août 1944, le char de Jean BOUCLET est pris à partie par un antichar 75, selon la terrible relation qu'en fit Maurice BOVERAT :

" La 2e section (lieutenant Meyer) progresse dans les bois environnants quand soudain le char l'Ourcq est atteint en pleine tourelle par un perforant ennemi et prend feu ; le conducteur Lafont réussit à éviter le deuxième coup de l'antichar, en reculant dans les broussailles. L'obus a tué net le chef de char BOUCLET et le radio-chargeur Cadiot. Le tireur Douillon, qui ne peut sortir par en haut à cause des cadavres, réussit, en déchirant ses vêtements, à se glisser hors de cet enfer par un des postes avant. Il nous rejoint en courant, couvert de sang et de cervelle ; la manière dont il nous raconte cela en souriant nous fait frissonner : il est "sonné" ! C'est un brave petit gars de dix-huit ans, qui a rejoint par l'Espagne, accroché sous une locomotive. Le sergent BOUCLET s'était engagé à seize ans, et son frère avait été tué sur un navire lors du bombardement anglais de Mers-el-Kébir. C'est un des meilleurs de la compagnie qui s'en va ; Cadiot, lui, venait du Pérou ; il adorait la poésie et, en Libye, nous amusait tous lorsque nous l'entendions déclamer, seul sous sa tente, des tirades de Cyrano.

L'aide-conducteur Vercher, un Espagnol, vétéran de la guerre d'Espagne, remonte sur le char, éteint son incendie, et le ramène malgré l'antichar qui sûrement est là à le guetter.

Je grimpe sur l'Ourcq, l'intérieur de la tourelle est sens dessus dessous. Le poste de radio a fait plusieurs fois le tour de la paroi avant de tomber au fond du char ; le radio-chargeur est décapité et le chef de char est coupé en deux : ils n'ont pas souffert".

 

Jean BOUCLET, 19 ans, fut déclaré Mort pour la France le 13 août 1944, tué dans son char 'L'Ourcq", par un antichar 75, route de Sées à Carrouges (La Lande-de-Goult, 61).

 

En octobre 1944, le capitaine Branet, commandant la 3e compagnie du 501e RCC 2e DB, écrivit une lettre très émouvante au père de Jean :

« Monsieur,

C’est bien tardivement que je peux vous écrire, en profitant d’une accalmie de la Campagne de France. Je veux vous parler en quelques mots de votre fils Jean qui, comme vous les savez est mort pour la France le 13 août en forêt d’Ecouves.

En évoquant avec vous votre fils disparu et en remuant à nouveau votre chagrin, je ne puis que vous affirmer toute la part que les officiers, sous-officiers et hommes de notre unité prennent à votre deuil.

Votre fils était avec moi depuis près de trois ans ; il était un des gradés les plus brillants de mon unité et quelques jours avant je lui avais confié tout mon espoir de le voir, au cours des opérations, passer rapidement officier. Adoré de ses hommes et de ses camarades, c’était une âme de jeune chef dont la France peut être fière.

Il n’était pas avec moi quand il a été tué. Ce matin-là justement, sa section commandée par le lieutenant Meyer dont il était l’adjoint, avait été mise aux ordres de mon ami et camarade de combat, le capitaine de Boissière. Un obus est venu frapper le char « L’Ourcq » de plein fouet. Il a été tué aussitôt. Son camarade et ami de la Fouchardière se trouvait non loin de là. Je pense qu’il vous a écrit.

Votre fils a reçu depuis la Croix de guerre avec citation à l’ordre de la Division avec le motif :

« Engagé aux F.F.I. à 15 ans, sous-officier à 17 ans, chef de char d’élite, magnifique exemple pour ses camarades, conduisant une patrouille de pointe sur le village de La Lande de Goult. A trouvé une mort glorieuse le 13 août 1944. »

Excusez-moi de vous écrire une lettre si sèche et si banale. Je voudrais moi-même pouvoir vous dire un jour de vive voix, toute l’affection que j’avais pour votre fils et toute la peine que j’ai éprouvée. Mais sa mort glorieuse n’aura pas été inutile : la France sera sauvée par de tels fils ! »

 

 

Jean Bouclet a reçu la Médaille militaire à titre posthume (JO du 24 juin 1949 - page 6233)

 

 

Il est possible qu'il ait été promu sous-lieutenant à titre posthume, comme l'indique son grade atteint pendant la guerre, sur le Livre d'Or des Français Libres.

 

 

Son nom figure sur le Monument aux morts du Lycée François 1er. 

Une stèle a été érigée sur la D908, au carrefour du Point du jour, au nord-est de Tanville, à la mémoire des soldats de la 2e Division blindée qui sont morts dans les combats pendant la Bataille de Normandie, le 13 août 1944 : Michel de Boncourt, Jean BOUCLET, Philippe Cadiot, Roger Driau et Maurice Gator.

 

Source : Geneanet

Plaque érigée en mémoire des hommes de la 2e DB tombés pour la Libération du département

Source : Geneanet

RESSOURCES

 

Dossier Résistant au SHD de Vincennes. Cote GR 16 P 77493 (non consulté).

 

Dossier au SHD de Caen . Cote AC 21 P 28773  (consulté)

 

Livre d'Or des Français Libres  : Jean Bouclet

 

Film INA sur la visite du général de Gaulle à Malvern, 1941

 

Site de l'ASCFL

 

Cadets de la France Libre, l'Ecole militaire. André Casalis, Lavauzelle, mai 1994.

 

Du Cotentin à Colmar, avec les chars de Leclerc. Maurice Boverat, 1947.

 

L'Escadron, Carnets d'un cavalier, Jacques Branet, Flammarion, 1968.

 

Les Cadets dans la Bataille de Normandie. ASCFL, juillet 2019

 

Trois photos du Char 44 - L'Ourcq sur le site Chars-Français.net 

 

Cartes situant la Forêt dEcouves sur le Forum de la 2e DB 

 

Stèle "le cercueil" sur le site Geneanet

 

Plaque commémorative des hommes de la 2 DB tombés au cours de la Libération  dans le département sur le site Geneanet