LEBAS Marcel (1907-2014)  Forces Terrestres en Grande-Bretagne FTGB                                  Prévôté

Marcel Lebas, Southport 1940. Copyright Pierrette Thuillier

Nos remerciements à Pierrette Thuillier, nièce de Marcel Lebas

Le 10 mai 1940, la Belgique est envahie par les Allemands, et son gouvernement appelle la France à l'aide. Le peloton motocycliste, au sein de la 3e division légère blindée où sert le sergent Marcel LEBAS, né le 26 Mars 1907, un cauchois issu d'une famille de cultivateurs de la Poterie-Cap-d’Antifer (76), monte au contact de l’ennemi dans le Nord.

Marcel LEBAS est blessé à la jambe à Bailleul, mais refuse d'abandonner sa moto.

Sissonnes, mars 1940 - Marcel Lebas à droite

Copyright Pierrette Thuillier

 

L’armée française bat en retraite, et après 48 heures passées sous les bombardements dans les dunes près de Dunkerque, il est de nouveau blessé à l’épaule au cours d’une tentative d’embarquement.

Le 1er juin, il réussit à embarquer sur une vedette particulière britannique.

Parvenu en Angleterre le lendemain, Marcel LEBAS gagne Londres où il se fait soigner au Sutton hospital, puis à Southport.

Marcel Lebas prend contact avec les Forces Françaises Libres et s’engage le 1er juillet sous le nom d’emprunt de Pierre Sabel (anagramme de son nom), mais il ne pourra signer son engagement que le 5 octobre 1940, à sa sortie de l’hôpital.

 

Copyright Pierrette Thuillier

Affecté au sein des Forces Terrestres de Grande-Bretagne (FTGB), il est d’abord employé à l’intendance puis, intégré à la police militaire, il entrera à l’Ecole de gendarmerie en 1942.

Londres, 1942 Marcel Lebas à l'extrême droite sur la photo

© Pierrette Thuillier

Londres 1942 : Marcel Lebas, au second rang, 4e à partir de la droite

Copyright : Pierrette Thuillier

Témoignage de Vincent Lhomeau

En janvier, deux nouveaux élèves sont affectés à la police militaire, le sergent d’artillerie Sabel, alias Lebas, et le caporal-chef du génie Chambrier. Mais le mois suivant, la prévôté déplore une nouvelle fois le manque de volontaires : « Pas de changement dans l’effectif malgré la propagande pour le recrutement », peut-on lire dans le JMO de la police militaire au mois de mars 1942.

Le commandement, particulièrement attentif à la bonne entente entre les polices militaires des deux nations alliées, encourage d’ailleurs la coopération entre gendarmes et policiers anglais.

Fait suffisamment rare pour être noté, le gendarme Marcel Lebas, de la prévôté des FFGB, reçoit, en novembre 1944, le témoignage de satisfaction suivant :

« Le colonel Renouard, commandant d’armes a décerné le témoignage de satisfaction suivant au gendarme Lebas Marcel Georges Pierre Mle 52968 de la prévôté de Londres : Gendarme qui, par son zèle, sa conscience et sa valeur professionnelles donne entière satisfaction. En moins de neuf mois a procédé seul à six arrestations et a participé à 31 autres. S’est particulièrement distingué au cours d’une enquête relative à une agression suivie de vol dont avait été victime un officier étranger. S’est vu adresser, à cette occasion, des félicitations écrites par la police britannique. »

Il est vrai que ce gendarme fait preuve d’un zèle et d’un esprit d’initiatives peu ordinaires. Le témoignage de satisfaction qu’il reçoit le 10 novembre 1944 doit beaucoup à l’arrestation d’un matelot français qu’il a accomplie seul à Londres, à peine deux mois plus tôt, alors qu’il n’était pas en service mais prenait le métro « en compagnie d’une femme ». Lebas raconte cet épisode dans le P.-V. qu’il dresse le 23 septembre (sa version des faits est confirmée par la déposition du matelot) :

« En permission à Londres et nous trouvant à la station de métro de Tottenham Court Road, avons reconnu, alors qu’il montait dans une voiture du métro, le déserteur Beauregard, vêtu d’un complet civil. Nous sommes monté dans le même compartiment et avons demandé à Beauregard de nous présenter ses pièces d’identité. Ce dernier a feint de ne pas comprendre. Nous lui avons renouvelé notre demande en anglais. Il nous répondit ne pas en avoir. Nous lui avons déclaré que nous l’avions reconnu et l’avons invité à nous suivre. Il s’est décidé alors à nous parler français et nos a dit : “Je me fiche de toi, tu n’es pas de service puisque tu es en Cie d’une femme. Je suis avec ma femme ; elle ne peut marcher, je vais l’accompagner à son domicile”. Nous lui avons dit que nous allions l’accompagner sur les lieux. Beauregard nous ayant dit se rendre à Clapham North nous avons dû changer de métro à Kennington. Beauregard laissa sa compagne s’asseoir seule et se tint près de la porte du compartiment. Au moment où les portes automatiques se fermaient, il voulut prendre la fuite. Nous l’avons poussé à l’intérieur du compartiment. Là il nous a dit : “Vous ne me tenez pas encore. On va voir à la sortie”. Au cours du trajet, il changea d’idée et manifesta le désir de descendre à la station Stockwell. Arrivé à cette station, Beauregard, au moment de descendre, alors que nous étions déjà sur le quai, se tenait avec sa compagne dans l’embrasure des portes et de ce fait empêchait la rame de partir. Nous l’avons alors pris par le bras et entraîné sur le quai. Il essaya de s’échapper en nous bousculant, appela à l’aide et nous menaça en ces termes : “Laisse-moi tranquille ou je vais te faire la peau. Tu vas le gagner ton galon salaud. Tu peux le mettre sur ton rapport, je m’en fiche.” Ayant réussi à se dégager un peu de notre emprise, il voulut nous frapper d’un coup de pied dans le bas-ventre, que nous avons pu éviter de justesse. Il nous bouscula pour nous faire tomber sur la voie. Nous avons alors demandé assistance à un marin anglais. Beauregard persista dans son attitude et réussit à ameuter une centaine de personnes sur la partie du quai où nous nous trouvions, bousculant la foule au risque de causer un accident. Ceci dura près d’un quart d’heure et se termina par l’arrivée de la police anglaise (1). »

Témoignage de satisfaction - Copyright Pierrette Thuillier

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Monsieur Marcel LEBAS, doyen des membres de l'Association des Anciens et Amis de la France Libre du Havre, assistait fièlement aux commémorations de l'Appel du 18 Juin.

Il nous a quiités à l'âge de 107 ans en 2014.

Marcel Lebas, le 18 Juin 2008, Place du général de Gaulle au Havre

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Ressources

 

(1) Etude de Vincent Lhomeau publiée dans Revue Force Publique  LIEN

 

Dossier Résistant de Marcel LEBAS au SHD à Vincennes (non consulté). Cote GR 16 P 345702